

Les enfants, au lit ! Pourquoi chaque minute compte...

Une étude récente montre que les parents ne devraient pas abandonner trop tôt la lutte pour trouver la bonne heure de coucher : quelques minutes de sommeil supplémentaires peuvent avoir un impact important sur les enfants et les adolescents.
« Au lit ! » Mes enfants réagissent de plus en plus souvent à cette injonction en haussant les épaules. Ma demande ne leur arrache qu’un sourire fatigué. Après le troisième rappel, ils vont enfin se brosser les dents, mais il faut encore attendre un bon moment avant que le calme ne s’installe enfin. Même si je suis exténué depuis déjà un bout de temps, mes enfants, eux, sont encore plein d’énergie ; ils ne se rendent malheureusement pas compte qu’ils en auraient plutôt besoin demain matin...
Étude à long terme sur le développement du cerveau
Des chercheuses et chercheurs de Cambridge et de Shanghai ont voulu mieux comprendre les effets d’un manque de sommeil chez les enfants (pré)pubères. Les données qu’ils ont examinées (page en anglais) proviennent des États-Unis où plus de 3200 adolescents participent à l’étude ABCD. « ABCD » signifie « Adolescent Brain Cognitive Development » (développement cognitif du cerveau des adolescents) : il s’agit de la plus grande étude à long terme sur le développement cérébral et la santé des enfants dans le pays.
Les données collectées se basent sur des scanners IRM et des tests cognitifs tels que la lecture, la résolution de problèmes ou des tâches de concentration. Afin de mesurer le sommeil des sujets âgés de 11 et 12 ans, ils ont été équipés de bracelets Fitbit.

Première constatation : nous ne sommes pas les seuls à ne pas dormir suffisamment. Les jeunes américaines et américains restent éveillés très tard. En moyenne, ils sont loin d’atteindre les huit à dix heures de sommeil recommandées par nuit.
Peu, encore moins, trop peu
Au total, les scientifiques ont réparti les participants en trois groupes. Un groupe ne dort pas assez, le suivant encore moins et le troisième beaucoup trop peu. Voici le résultat :
- 39 % arrivent à une moyenne de 7 heures et 10 minutes par nuit. Ils se couchent tard, se réveillent tôt et ont un pouls plus élevé la nuit.
- 24 % ont une durée moyenne de 7 heures et 21 minutes et présentent des caractéristiques de sommeil globalement normales.
- Les 37 % restants dorment en moyenne 7 heures et 25 minutes, ont tendance à se coucher plus tôt et ont un pouls plus faible la nuit.
Ce qui frappe immédiatement, c’est que les différences entre les groupes sont minimes. En moyenne, seulement 15 minutes séparent les gros dormeurs des petits dormeurs. Cela correspond à peine à une petite dispute familiale sur l’heure du coucher.
Plus de volume cérébral, meilleurs résultats aux tests
Le groupe ayant le temps de sommeil le plus long a une légère avance sur les autres en matière de développement. Ils avaient un plus grand volume cérébral et ont obtenu les meilleurs résultats aux tests. Le groupe intermédiaire suivait, tandis que les petits dormeurs ont obtenu les résultats les plus faibles.
Ces conclusions peuvent également être transposées à d’autres groupes d’âge. Que ce soit chez les jeunes de neuf ou quatorze ans, les différents types de sommeil ont toujours révélé les caractéristiques correspondantes, et ce malgré des différences étonnamment faibles en ce qui concerne le repos nocturne.
« Étrangement, nous en savons assez peu sur le sommeil des adolescents, alors qu’il s’agit d’une phase cruciale de leur développement », déclare Barbara Shahakian (page en anglais), l’une des autrices et professeures de neuropsychologie clinique à l’université de Cambridge. Même si la soif de connaissances de la scientifique est loin d’être assouvie, le fait que chaque minute de sommeil vaille la peine d’être défendue me motive.
Réveiller les enfants dix minutes plus tard le matin, par exemple, n’est pas un problème pour moi. Il ne resterait plus qu’à trouver le moyen de s’endormir plus tôt. Certes, une étude ne peut à elle seule apporter une réponse définitive à la question de savoir s’il existe un lien direct entre le sommeil, le fonctionnement du cerveau et les résultats des tests chez les jeunes, mais selon l’auteur principal, le docteur Quing Ma de l’université de Fuhan, plusieurs recherches soutiennent cette hypothèse.
Les filles dorment un peu plus longtemps
Il existe également une série de facteurs que l’on soupçonne d’avoir une influence sur le sommeil des adolescents et qui doit être étudiée plus en détail. Par exemple, la télévision, les jeux vidéos et les téléphones portables. À remettre en cause : le temps d’écran, surtout le soir. Smartphones ou pas, il est normal qu’à l’adolescence, les jeunes dorment moins. L’horloge interne se modifie et ne fonctionne pas de la même manière pour tout le monde.
Selon une méta-analyse de données provenant de 20 pays (page en anglais), la durée du sommeil par nuit tend à diminuer de 14 minutes par an entre 9 et 18 ans. Les filles passent en moyenne onze minutes de plus au lit que les garçons, et le week-end, lorsqu’elles rattrapent leur dette de sommeil, ce sont même 29 minutes de plus.
Sommeil et école
Si l’on fait une comparaison internationale, les jeunes Européennes et Européens sont donc de véritables rêveurs : ils dorment jusqu’à une heure de plus que les adolescentes et adolescents américains et jusqu’à deux heures de plus que leurs homologues asiatiques. Il est certain que dormir plus longtemps est meilleur pour la santé, mais cela ne se traduit pas par de meilleurs résultats scolaires, comme le montre chaque année l’étude PISA, dans laquelle le Japon et la Corée du Sud occupent régulièrement les premières places.
Sur ce point, les chercheuses et chercheurs de Cambridge et de Shanghai n’ont pas non plus constaté de différences significatives entre les groupes à partir des données de l’étude ABCD. La raison pour laquelle il en est ainsi, malgré les meilleures performances cognitives des personnes qui font la grasse matinée, reste pour l’instant un mystère, et permet aux parents des jeunes qui dorment plus longtemps le matin de souffler au moins sur ce point. Peut-être que leurs enfants étudient simplement trop longtemps le soir.


Écrivain amateur et père de deux enfants, j’aime être en mouvement et avancer en équilibre sur le chemin sinueux de la vie de famille. Je jongle avec plusieurs balles et il m’arrive parfois d’en faire tomber une. Il peut s’agir d’une balle, ou d’une remarque. Ou des deux.