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Point de vue

Confessions d’un ex-végane

Thomas Meyer
8/12/2023

« L’alimentation végane n’est pas saine. » C’est ce que je dis après avoir été végane pendant dix ans. Malgré tout, le véganisme a sa raison d’être.

Il y a une quinzaine d’années, je passais volontiers mes matinées à la confiserie Sprüngli à Zurich. Je trouvais cette ambiance inspirante. Aujourd’hui, j’écris tôt le matin et je préfère rester chez moi pour le faire. Je continue à boire du thé vert, mais je suis en sous-vêtements. Bien plus confortable !

À l’époque, mon petit déjeuner était simplissime : une Ovo froide et un croissant au beurre. Il m’arrivait d’en commander plusieurs fois de suite. Quand je sortais de la confiserie, je ressentais souvent des crampes d’estomac et des ballonnements. Plus d’une fois, j’ai dû retourner d’urgence au café pour aller aux toilettes.

J’attribuais ces désagréments à toute sorte de raisons, sauf à mon rituel du matin. Mon médecin d’alors me disait que cela devait être une intolérance au lactose et que le lait était fait pour les veaux, pas pour les êtres humains.

J’étais horrifié. D’autant plus que pendant des années, j’avais réussi à ignorer cette réalité. J’ai donc décidé de ne plus manger de viande. Et après avoir vu des vidéos de poussins broyés, j’ai aussi renoncé aux œufs.

La grande contradiction

Notre consommation effrénée entraîne des conséquences brutales, cruelles et destructrices, voire autodestructrices. Voici une partie de la réalité.

L’autre partie est que le corps humain a besoin de protéines animales. Du point de vue de l’évolution, notre organisme en est resté à l’âge de pierre. Il n’a pas encore compris que l’élevage intensif est problématique. Il en est resté au mode mammouth.

Le regard de la gastroentérologue

Quand j’ai commencé à être végane, j’ai bien supporté l’absence de lait, de fromage, de viande et d’œufs. Assez vite, j’ai ressenti des troubles diffus qui, bizarrement, ressemblaient à ceux que j’avais après mes petits déjeuners chez Sprüngli : des crampes intestinales, des ballonnements, des diarrhées. Tant et si bien que j’ai pris rendez-vous chez une gastroentérologue.

Elle m’a prescrit une cure intensive de vitamine B12. Quatre injections la première semaine, puis une par semaine pendant un mois. Puis une par mois. J’ai suivi cette procédure pendant des années, elle semblait me convenir.

Mais avec le recul, quelque chose n’allait pas. Cela ne marchait pas vraiment.

« Je devrais donc… manger de la viande ? »

Je souffrais encore et toujours des mêmes symptômes. Et je soupçonnais qu’une assiette de pâtes à la viande hachée serait salutaire. D’autant que j’avais souvent envie d’en manger, sauf que j’étais végane et fier de l’être. Je me considérais comme quelqu’un d’exceptionnel. Je regardais de haut les carnivores, que je trouvais primitifs.

Quand on se sent supérieur, ce n’est jamais bon signe. Cela veut dire que l’on est allé trop loin. On a oublié la cause d’origine et l’on se perd dans sa propre vanité. En fin de compte, on a perdu le nord.

Notez que c’est aussi valable dans l’autre sens. Quand des carnivores trouvent les véganes et leurs arguments ridicules, ils vont eux aussi trop loin.

Le lendemain, je me suis acheté au supermarché une saucisse de poulet et un poké bowl au saumon. C’était tellement délicieux que j’en ai pleuré. Je vous jure que je me sentais bien mieux après ce repas. « Qu’est-ce que tes considérations éthiques t’apportent si tu te sens si mal physiquement ? », me demanda ma compagne.

Bonne question.

Dans mon innocence, je pensais qu’avec une saucisse de poulet de temps en temps, je trouverais un équilibre confortable entre ma conscience et mon bien-être physique.

Quelques jours plus tard, ma compagne (elle aussi végane) et moi-même traversions l’Allemagne en train pour rejoindre la mer du Nord. À Karlsruhe, je me jette sur mon lit et commence à geindre « Je veux manger de la viande. Tout de suite ! » L’homme préhistorique qui se cache en moi était désespéré.

Nous avions l’intention d’aller déguster des sushis véganes. En voyant les photos affichées devant le restaurant italien qui se trouvait en face de l’hôtel, j’ai craqué. Je me suis précipité au restaurant et j’ai commandé une pinsa au jambon de Parme. Elle était délicieuse ; cela m’a vraiment réconforté. J’ai remercié intérieurement le cochon qui avait donné sa vie pour moi. « No biggie, your piggy ! » couina le porcinet d’outre-tombe.

J’étais sûr que j’aurais la paix pendant plusieurs semaines, un peu comme un python qui dévore un lièvre de temps en temps. C’est ce que je pensais. Ensuite, je suis allé en Norvège pour photographier les aurores boréales.

La capitulation

En Norvège, nous passions nos journées en plein air. Il faisait froid et le vent soufflait. Physiquement, cela me sollicitait plus qu’une journée passée à écrire assis dans mon salon. Mon organisme a capitulé dès le deuxième jour. Au supermarché, j’ai acheté du rosbif et des tranches de poitrine de poulet pour en garnir nos sandwichs.

« Trop cool », hurlait mon corps. « J’en veux plus ! » « Mais… et la souffrance animale ? Et l’environnement ? », répondais-je en recouvrant mon pain d’une couche supplémentaire de rosbif. « Je t’entends », rétorqua mon corps. « Mais toi, est-ce que tu m’écoutes ? »

Bonne question.

Depuis, je mange de la viande un jour sur deux. Je n’ai pas besoin de plus, mais je ne peux pas me contenter de moins. Le troisième jour sans viande, l’homme des cavernes qui sommeille en moi se réveille en vociférant.

Mon organisme commence à avoir du mal avec le blé et des produits liés à la sédentarité comme le sucre. Il préfère le régime paléo, c’est-à-dire identique à celui de nos lointains ancêtres : des noix, des fruits, des légumes, de la viande. Si je m’y tiens, mon système digestif me laisse en paix.

Mes deux conclusions

Je continue à penser que les véganes ont raison sur le principe. Nous mangeons trop de viande, en tout cas beaucoup plus que ce qui est sain pour nous. Ce faisant, nous pillons les ressources naturelles et maltraitons les animaux. Tout, absolument tout, s’oppose à ce que nous continuions sur notre lancée. Nous devons apprendre à nous modérer.

En revanche, le mode de vie végane et le renoncement complet à la viande ne sont pas judicieux. Cela va à l’encontre de notre physiologie (en tout cas de la mienne). Je pourrais certes me contenter du fromage, si je le digérais bien. Or, ce n’est pas le cas. En fin de compte, ce que je supporte le moins, c’est ce que j’ai pratiqué pendant dix ans.

Ce serait génial si nous divisions par deux notre consommation de viande. Nous n’en avons pas besoin de plus, d’autant que la nature ne peut pas en produire plus dans de bonnes conditions. Cela nous éviterait de devoir importer du soja brésilien.

Quant à ma seconde conclusion, elle concerne nos relations interpersonnelles. Si nous sommes incapables de discuter calmement sans nous haïr, nous n’arriverons à rien. Cette animosité permanente conduit à des mini-guerres civiles qui n’apportent jamais de bonnes solutions, mais qui ferment les visages et les cœurs.

Nous avons oublié comment discuter, car nous pensons qu’il suffit de s’opposer à nos adversaires. Une erreur fatale ! De fait, les deux interlocuteurs ont souvent raison, en partie du moins. Accepter cette réalité revient à accepter nos contradictions. Ce dont nous ne sommes souvent plus capables, hélas. Pourtant, l’esprit humain rajeunit quand il comprend qu’il a avancé pendant (trop) longtemps dans la mauvaise direction.

En d’autres termes, moins de viande, plus de contradictions !

Photo d’en-tête : Thomas Meyer

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Né à Zurich en 1974, Thomas Meyer est écrivain. Il a travaillé comme rédacteur publicitaire jusqu'en 2012, date à laquelle son premier roman, « Le formidable envol de Motti Wolkenbruch », a été publié. Papa d'un garçon, il a toujours une bonne excuse pour acheter des Lego. Pour en savoir plus sur lui : www.thomasmeyer.ch. 


Point de vue

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