En coulisse

J’ai testé le shinrin yoku, un « bain de forêt » professionnel

J’ai participé à un stage de shinrin yoku, durant lequel j’ai pris un bon bain de forêt, guidée par une spécialiste en la matière. Bien que cette journée m’ait donné quelques idées, je continuerai à aller me détendre seule en forêt à l’avenir.

Prendre un bain de forêt, ce n’est pas se délasser dans un lac entouré d’arbres, même si ce serait certainement très sympathique ! Non, le bain de forêt, appelé shinrin yoku en japonais, consiste à s’immerger dans la végétation de la forêt. Si ce concept paraît étrange au premier abord, ces effets très positifs sur la santé (en anglais) ont été démontrés.

Je me suis inscrite à un stage pour en apprendre davantage sur le sujet. J’ai quitté la civilisation, son agitation et son bruit pendant trois heures, et je me suis laissée imprégner du calme d’une forêt au nord-est de Hambourg.

J’arrive dans un autre monde. La forêt m’accueille dans son atmosphère magique.
J’arrive dans un autre monde. La forêt m’accueille dans son atmosphère magique.
Source : Anna Sandner

Les enseignements d’une « maître-nageuse »

Mon bain de forêt commence devant la Haus der Wilden Weiden (en allemand), un musée d’histoire naturelle situé dans la réserve naturelle de Höltigbaum.

Il fait chaud, l’air est sec, et j’attends avec impatience de me rafraîchir à l’ombre des arbres. Sept autres personnes en quête de calme se joignent à moi. La « baignade » est dirigée par Angela von der Geest, pédagogue de la nature, qui s’est elle-même baptisée « maître-nageuse de la forêt » (en allemand). Je comprendrai mieux pourquoi au cours de l’après-midi. Nous nous rassemblons devant la forêt et recevons quelques informations de base.

Un bain de forêt pour sortir du stress urbain

Le shinrin yoku a été développé dans les années 80. Le gouvernement japonais cherchait à offrir à ses citoyennes et citoyens un moyen d’échapper régulièrement au développement urbain en plein essor. Passer du temps en pleine conscience dans la nature, si possible dans la forêt, semblait être un bon moyen d’y parvenir. En parallèle, le gouvernement japonais a lancé de vastes projets de recherche pour étudier les effets du shinrin yoku. Plus tard, la communauté scientifique internationale s’est elle aussi penchée sur les effets positifs qu’a cette méthode sur le corps et l’esprit : réduction du stress, de l’anxiété et des effets de la dépression, ou encore renforcement du système immunitaire.

Les effets positifs de cette mer de feuilles vertes sur le corps et l’esprit ont été prouvés par la science.
Les effets positifs de cette mer de feuilles vertes sur le corps et l’esprit ont été prouvés par la science.
Source : Anna Sandner

Notre maître-nageuse dégage un calme incroyable. Si elle le puise ici, notre expérience ne pourra être que relaxante.

Plonger dans les feuilles

Nous sommes prêts à commencer la baignade. Nous nous arrêtons dans une prairie et nous formons un cercle devant la première rangée d’arbres. Pour nous mettre dans l’ambiance, Angela commence par quelques exercices d’attention et de respiration. Ils visent à nous calmer, nous ralentir et nous aider à pénétrer dans un autre monde. « La lenteur est le seul rythme autorisé dans la forêt dans les heures qui viennent. » Un quart d’heure et quelques exercices de qi gong plus tard, je me détends déjà un peu, tout en restant impatiente de m’immerger dans la forêt. Nous nous remettons en route, lentement et en silence.

À peine avons-nous dépassé les premiers arbres que j’ai déjà l’impression d’être absorbée dans l’atmosphère calme et fraîche de la forêt.

Nous marchons un peu jusqu’à ce que nous soyons tout entourés d’arbres. Notre maître-nageuse pose une couverture sur le sol, un peu à l’écart du chemin. C’est le point de rencontre vers lequel nous reviendrons régulièrement après nos expériences dans la forêt.
Je suis botaniste et j’ai longtemps étudié les arbres et les manières de déterminer leur âge. J’observe ce qui m’entoure, et j’ai de la peine à me concentrer. La zone dans laquelle nous nous trouvons est sauvage et intacte, ce qui me plaît beaucoup. La plupart des arbres sont assez jeunes et, comme je l’apprendrai plus tard, ce n’est qu’une petite parcelle. Dommage. J’aurais préféré une grande forêt, dense et ancienne.

Quelques vieux géants dominent les jeunes arbres.
Quelques vieux géants dominent les jeunes arbres.
Source : Anna Sandner

La forêt, une expérience sensorielle

Nous pouvons enfin commencer. Nous recevons notre première tâche, et nous sommes autorisés à partir dans toutes les directions jusqu’à ce que la « chouette », un petit sifflet en bois sculpté en forme de chouette, nous rappelle. Angela nous propose de regarder seulement ce que nous voyons, et de nous en imprégner sans rien toucher. Chacun part de son côté.

Je remarque que j’essaie intuitivement de m’éloigner des autres. Je veux vivre cette expérience en paix, leur présence me dérange un peu. Je me demande s’il n’aurait pas mieux valu partir seule dans une vieille forêt vraiment isolée plutôt que de ralentir en groupe en suivant des consignes. De toute façon, c’est trop tard pour changer d’avis. Je décide de me plonger autant que possible dans cette expérience.

Il y a tellement de choses à découvrir autour de nous lorsqu’on prend vraiment le temps de le faire ! La forêt est remplie de microcosmes interconnectés.
Il y a tellement de choses à découvrir autour de nous lorsqu’on prend vraiment le temps de le faire ! La forêt est remplie de microcosmes interconnectés.
Source : Anna Sandner

Sentir, goûter, écouter, toucher

Alors que chacun se balade de son côté, nous entendons la chouette « hululer », et nous nous rassemblons autour de la couverture. Je suis la dernière à revenir. Ai-je ralenti plus que les autres ?

L’exercice suivant consiste à toucher, sentir et, si cela nous paraît juste, goûter la forêt. Je m’éloigne délibérément des autres. Je caresse quelques feuilles et finis par m’appuyer contre un grand arbre. Je n’ai pas besoin de goûter quoi que ce soit. Le doute s’installe à nouveau... Est-ce que ce stage est trop abstrait pour moi ? Si j’étais seule, je me trouverais un bel endroit et je laisserais la forêt faire son effet, sans mission, sans personne et sans être en état d’alerte constant pour ne pas manquer le cri de la chouette. Je n’arrive pas à penser à autre chose jusqu’à ce que je l’entende à nouveau.

Le moment marquant de l’après-midi : marcher pieds nus sur le sol mousseux de la forêt

Après un court échange pour savoir ce que les autres ont touché, senti et goûté, Angela nous demande d’enlever nos chaussures. Certains sont un peu perplexes et, bien que j’aime beaucoup marcher pieds nus, je suis moi aussi un peu surprise par cette requête. Bon, après tout, pourquoi pas ?

Marcher pieds nus sur le sol moelleux a été mon expérience la plus marquante de la journée.
Marcher pieds nus sur le sol moelleux a été mon expérience la plus marquante de la journée.
Source : Anna Sandner

Le sol est incroyablement moelleux. Mes pieds s’enfoncent très légèrement dans la terre agréablement fraîche et meuble. Je suis fascinée par cette expérience inattendue, et je comprends que j’ai fait le bon choix ! Seule, je n’aurais pas eu l’idée d’enlever mes chaussures dans la forêt. Et je sais déjà que j’essaierai autant que possible de reproduire cette expérience à l’avenir.

Lorsque chacun s’est bien imprégné de cette sensation inhabituelle, nous nous rassemblons à nouveau. L’exercice suivant consiste à écouter. Notre maître-nageuse décrit précisément ce que nous devons faire pendant les 15 prochaines minutes : écouter attentivement dans différentes directions, les unes après les autres. Qu’entendons-nous ? Quels oiseaux pouvons-nous identifier par leur chant ? Réussissons-nous à faire abstraction du léger bruit de l’autoroute, ou plutôt à le transformer en bruit de rivière qui coule, par exemple ? Nous pouvons remettre nos chaussures, si nous le souhaitons. Pas question !

Je baigne dans un calme décontracté

Je peux enfin faire ce que j’avais prévu de faire depuis le début : chercher un endroit confortable (loin des autres, évidemment), m’assoir par terre, m’appuyer contre un vieux chêne noueux et fermer les yeux. J’essaie d’écouter dans une seule direction, mais ce n’est pas très concluant. Je profite simplement du calme, du chant des oiseaux et du bruissement du vent sous l’épais toit de feuilles, peu importe la direction vers laquelle je tourne mes oreilles. Je ne fais plus qu’un avec la forêt...

Je m’appuie confortablement contre l’arbre que j’ai choisi et je laisse la forêt me submerger.
Je m’appuie confortablement contre l’arbre que j’ai choisi et je laisse la forêt me submerger.
Source : Anna Sandner

... jusqu’à ce que le hibou me ramène à la réalité. Ce sifflet m’agace plus qu’autre chose, j’aurais bien voulu rester près de mon chêne. Je me résigne à rejoindre les autres. La tâche suivante ne me plaît pas vraiment. Angela donne à chacun d’entre nous un miroir à tenir à 90 degrés, juste au-dessus ou en dessous des yeux, pour nous donner de nouvelles perspectives. Nous pouvons également l’utiliser pour regarder le dessous des feuilles observer l’intérieur d’un tronc d’arbre creux. Je suis vite à court d’idées et j’attends cette fois avec impatience d’entendre le fameux hululement. Les réactions des autres baigneurs sont positives, je semble être la seule à ne pas apprécier les miroirs. Peu importe, place au deuxième point fort de la journée !

Se balancer en toute simplicité

Pendant que nous nous promenions avec nos miroirs, Angela a tendu des hamacs entre les arbres. J’adore cette dernière demi-heure. C’est de nouveau quelque chose que je n’aurais pas fait par moi-même. Chacun choisit un hamac. À mon grand soulagement, nous n’avons rien d’autre à faire que de nous laisser aller, nous détendre et somnoler. Génial, c’est exactement ce que je voulais ! Je me balance dans mon hamac, ravie.

Un profond sentiment de satisfaction m’envahit alors que je suis allongée dans mon hamac, parfaitement détendue. Je pourrais passer le restant de mes jours ici.
Un profond sentiment de satisfaction m’envahit alors que je suis allongée dans mon hamac, parfaitement détendue. Je pourrais passer le restant de mes jours ici.
Source : Anna Sandner

Il est gentiment temps de quitter la forêt. Nous avons l’impression d’avoir passé quelques heures dans un autre monde. Je remarque l’effet que la forêt a eu sur moi et sur les autres participants. Nous sommes calmes, heureux, satisfaits. Dans l’ensemble, tout le monde donne un retour très positif, mais je ne suis pas la seule à m’être sentie un peu stressée par le minutage de l’événement. Un autre participant fait remarquer qu’il ne s’est jamais complètement détendu, parce qu’il craignait de rater le rappel à la couverture. Un autre, comme moi, ne remet ses chaussures qu’en quittant la forêt, et est ravi d’avoir fait cette expérience.

Conclusion : je ne le referai pas forcément, mais ça en valait la peine

Dans l’ensemble, mon bain de forêt encadré en a valu la peine. Après trois heures dans la forêt, j’ai ralenti, je me sens détendue, calme et satisfaite. Je n’ai pas besoin de l’avis des scientifiques, mes sensations me suffisent pour corroborer l’effet positif des bains de forêt. Même si je n’ai pas forcément accroché sur certains exercices, ils m’ont donné des idées qui enrichiront mes prochaines visites en forêt et ça, c’est précieux. Et ce bain de forêt m’a rappelé les bienfaits de la forêt.

J’ai beaucoup aimé ce bain de forêt, et je reviendrai bientôt dans cette mer de feuilles vertes.
J’ai beaucoup aimé ce bain de forêt, et je reviendrai bientôt dans cette mer de feuilles vertes.
Source : Anna Sandner

Je prendrai sans doute plus souvent un petit bain de forêt à l’avenir, sans aucune consigne mais avec un hamac dans mon sac.

Photo d’en-tête : Anne Sandner

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Rédactrice scientifique et biologiste. J'aime les animaux et je suis fascinée par les plantes, leurs capacités et tout ce que l'on peut faire avec et à partir d'elles. C'est pourquoi mon endroit préféré est toujours à l'extérieur - quelque part dans la nature, volontiers dans mon jardin sauvage. 

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